La formation à la réaction en situation de crise : apports du Digital Learning et des LMS
Date de parution
11/07/2023
Arnaud Emery est consultant en gestion de crise, il accompagne les organisations dans la conduite de projets et de négociations complexes et intervient régulièrement sur des sujets de formation. Il nous livre ici sa vision sur le rôle du Digital Learning, et plus particulièrement des plateformes LMS, pour former en situation de crise. Attention, Expert !
Un contexte propre à l’écosystème de la gestion de crise
Dans le monde des affaires, l’écosystème de la gestion de crise traite de sujets très variés. Il englobe les questions de sécurité, de sûreté et de gouvernance en situation de crise. La sécurité traite de ce qui est accidentel (incendie, chutes, évènements climatiques, etc.), la sûreté couvre ce qui relève de la malveillance (contrôle d’accès, vol, risque cyber, enlèvements ou terrorisme par exemple) et les sujets de gouvernance en situation de crise s’intéressent à des sujets plus transverses (monter et conduire une cellule de crise, une négociation complexe, communiquer en situation de crise, etc.).
Quelles obligations doivent respecter les entreprises dans ce contexte ?
L’objectif des solutions proposées par des cabinets spécialisés sur ces sujets comme Iremos* est autant de mettre en place des mesures de prévention (pour mitiger un risque en amont d’une situation potentiellement dangereuse), de protection (pour protéger les personnes ou les organisations d’un risque auxquelles elles sont actuellement soumises de par leurs activités) ou d’assistance (pour secourir les personnes lorsque le risque s’est réalisé malgré les mesures de prévention et de protection mises en place).
De fait, le législateur a posé un certain nombre de contraintes fortes sur les entreprises en matière de risques liés à la mobilité internationale. On trouve notamment le devoir de protection, ou « Duty of care », qui leur impose de prendre toutes les mesures nécessaires à la sécurité physique et mentale de leurs collaborateurs. Ces obligations s’appliquent y compris en dehors de leurs horaires de travail, lorsqu’ils sont en mission à l’étranger pour son compte (voir à cet effet les arrêts de la Cour de cassation Karachi en 2008 et Sanofi en 2011).
Pourquoi le Digital Learning peut être la meilleure réponse en situation de crise ?
La formation, qui participe aux mesures de prévention, est donc un des grands enjeux pour le secteur. C’est un des éléments qui permet à l’entreprise d’éventuellement démontrer face à un juge qu’elle a mis en place un dispositif sérieux visant à mitiger les risques auxquels sont exposés ses collaborateurs. Dans ces cas-là, on a coutume de dire qu’en plus des objectifs pédagogiques nécessaires qu’elle poursuit, la formation participe aussi au « parapluie juridique » de l’entreprise, sachant que des manquements au devoir de protection engagent la responsabilité pénale de ses dirigeants.
Cet écosystème, qui regorge de savoirs et de compétences extrêmement utiles aux organisations lorsqu’elles doivent affronter des crises graves, a également une particularité : son savoir est concentré sur une petite poignée d’experts dans chaque domaine, habitués à dispenser des formations en présentiel. Les experts qui ont la légitimité, le savoir et les compétences pédagogiques sont peu nombreux, peu disponibles et peinent à transmettre « en masse » des connaissances acquises par l’expérience qui pourraient pourtant être décisives pour leurs apprenants. La formation en présentiel, avec toute la profondeur des échanges qu’elle permet entre les apprenants et un ancien membre des forces spéciales françaises par exemple, ne répond malheureusement plus complètement aux enjeux des clients.
Ces derniers doivent s’adapter aux nouvelles contraintes réglementaires et former des milliers de collaborateurs chaque année aux risques sûreté & sécurité avec des budgets toujours contraints. Dans un passé encore récent, ils ne formaient en présentiel qu’une petite centaine de collaborateurs par an, choisis parmi les populations les plus exposées.
L’arrivée des plateformes LMS, un bouleversement majeur pour cette industrie
Le fonctionnement et les limites d'une plateforme LMS
Si les obligations réglementaires ont obligé les entreprises à former un nombre exponentiel d’apprenants à la gestion des risques, les budgets des directions sûreté et sécurités n’ont pas augmenté dans les mêmes proportions pour répondre à cette nouvelle attente. À cet égard, l’arrivée des plateformes LMS a permis d’atteindre les objectifs de formation fixés par le législateur.
La plateforme LMS (pour Learning Management System) est une plateforme informatique, dont on s’équipe auprès d’un fournisseur, généralement au prix d’une licence annuelle, pour héberger des modules de formation. Le fournisseur se charge du développement, de la maintenance et des mises à jour régulières de la plateforme pour offrir toujours plus de fonctionnalités aux apprenants et aux clients. Il est important de noter que l’acheteur est rarement l’utilisateur final de la plateforme, c’est l’apprenant qui va devoir apprendre à s’en servir et y suivre les contenus que lui propose ou que lui impose son employeur.
Une des limites régulièrement rencontrées par les acheteurs est de s’être concentré sur la qualité intrinsèque du module de formation, son esthétique, l’expertise qu’il contient ou ses atouts en termes de pédagogie en oubliant que le succès du déploiement du parcours dépend autant des modules que de la plateforme qui les met à disposition des apprenants. D’excellents modules peuvent avoir un taux de pénétration très faible chez les apprenants si ces derniers rencontrent des bugs à répétition sur la plateforme, ce qui les conduit à très vite abandonner et retourner à leurs tâches quotidiennes.
Comment l'outil LMS peut servir la formation à la réaction en situation de crise ?
Paradoxalement, l’apprenant n’est presque jamais sollicité par l’acheteur pour tester la plateforme et lui fournir un feedback lors de l’appel d’offres. Sachant à quel point l’expérience utilisateur est fondamentale et à quelle vitesse un apprenant peut abandonner une formation dès lors qu’il se trouve face à des difficultés techniques, il est impératif pour les organisations de choisir des plateformes dont le développement s’est centré sur l’expérience utilisateur pour maximiser les taux de pénétrations des parcours de formation proposés. Certes, une plateforme Moodle peut « faire le job » à moindres frais, mais c’est incomparable en termes d’expérience utilisateur, et donc de réussite dans le déploiement des parcours de formation, avec une plateforme comme UPility qui a intégré ce besoin comme un axe fondamental de son cahier des charges et de sa roadmap de développement.
Une bonne plateforme LMS doit être user-friendly, accessible aussi bien sur smartphone que sur ordinateur et traduite dans la langue de l’apprenant. Elle doit permettre l’interruption ou la reprise de la formation en un clic (avec un mécanisme de stop & go), délivrer si nécessaire un certificat ou une attestation en fin de formation et bien sûr fournir à l’organisation toute la traçabilité nécessaire sur les parcours suivis par ses apprenants via un module statistique poussé et des exports de rapports au format « .csv ».
Un atout supplémentaire qui commence à être proposé par certaines plateformes est d’intégrer un outil auteur. Cela permet au client d’améliorer à la marge son module de formation sans avoir recours au prestataire. Il peut développer des modules complémentaires en fonction de l’actualité ou de ses besoins immédiats qui seront compatibles avec la plateforme et permettront la même traçabilité que le module historique développé par un prestataire spécialisé. Cette nouvelle demande du marché est adressée par UPility avec l’intégration récente d’H5P.
Comment les solutions LMS garantissent le respect des normes ?
Au rang des normes qui commencent à s’imposer au secteur, on compte également la norme ISO 31030 qui s’intéresse au « Travel risk management ». Les plateformes LMS offrent une granularité et une traçabilité dans le déploiement des parcours de formation qui permet de répondre aux enjeux posés par ces nouvelles normes pour les clients.
Un autre sujet de préoccupation des clients, dès qu’on touche à des données sensibles comme celles liées aux déplacements professionnels des collaborateurs, ou aux plans de mise en sûreté utilisés par l’organisation, est de s’assurer que celles-ci soient hébergées en France sur des infrastructures sécurisées. C’est un des atouts de la plateforme proposée par Callimedia : tout est hébergé en France, sur des serveurs certifiés ISO 27001.
Comment le Digital Learning permet de former le plus grand nombre à moindre coût ?
Pour revenir à la formation en matière de gestion de crise, l’arrivée de l’apprentissage à distance (e-learning, digital learning et autres appellations) et des plateformes LMS a eu des impacts significatifs sur le coût de cette formation. Iremos, un cabinet de conseil en gestion de crise qui dispose d’une expérience significative sur ces sujets et qui est habitué à fournir ce type de formations confirme ce point. Historiquement, les formations en présentiel permettaient en une demi-journée de former 15 à 30 collaborateurs pour un coût d’environ 1500€ par session. À raison de plusieurs sessions par an, un grand groupe pouvait espérer former jusqu’à 200 collaborateurs pour un budget annuel entre 10 000 et 15 000 €, ce qui était encore loin de satisfaire à ses obligations en matière de devoir de protection. Pour les organisations, cela représentait un coût unitaire par collaborateur autour de 50€, en plus du coût nettement plus important de sa mise en disponibilité sur la demi-journée.
Certains grands comptes qui ont décidé de digitaliser leurs formations forment aujourd’hui en distanciel jusqu’à 8000 collaborateurs par an sur ces sujets via des modules disponibles sur étagère, pour un budget annuel généralement compris entre 30 000 et 50 000 €, soit un coût moyen par collaborateur situé entre 3 et 6 €. Il y a souvent un vrai effet d’échelle, le budget annuel pour une entreprise de taille intermédiaire se situe plutôt autour de 8 000 à 20 000 €. Cela leur a permis d’éliminer au passage le coût de sa mise en disponibilité, vu que la formation dure souvent moins d’une heure et qu’elle peut être suivie sur plusieurs jours, interrompue et reprise en fonction des impératifs de l’emploi du temps du collaborateur, depuis son domicile ou son lieu de travail.
Au début, il fallait ajouter au coût de création des contenus le budget lié à l’acquisition d’une plateforme LMS, ce qui pouvait représenter un frein ou tout du moins ralentir le déploiement de ces modules relatifs à la gestion du risque. La plupart des grands comptes étant maintenant équipés d’une LMS pour tous leurs besoins de formations, les e-learning en matière de gestion de crise viennent simplement s’ajouter au catalogue existant et mutualiser les coûts d’infrastructures déjà engagés tout en contribuant très utilement à limiter la sinistralité des collaborateurs sensibilisés. Ces derniers profitent généralement des savoirs acquis lors de ces formations non seulement dans le cadre de leur vie professionnelle mais également dans leur vie personnelle (vacances à l’étranger par exemple).
Conclusion
En tout état de cause, l’arrivée de ces outils a permis aux organisations de répondre aux attentes du législateur en respectant leurs contraintes budgétaires sur un sujet malheureusement souvent vu comme un « service support » par rapport aux formations liées à des besoins métiers. Si cela s’est parfois fait au prix du sacrifice des riches interactions qu’il pouvait y avoir entre un expert et une vingtaine d’apprenants lors d’une formation en présentiel, le digital a permis une diffusion extrêmement large de la culture sûreté dans les organisations qui l’ont adopté. Iremos confirme qu’il n’a d’ailleurs absolument pas empêché certaines organisations de combiner ces sensibilisations digitales avec des formations en présentiel pour les collaborateurs les plus exposés, afin de bénéficier du meilleur des deux mondes.
(*) Iremos est un cabinet de conseil de conseil en gestion de crise qui accompagne des organisations sensibles évoluant dans tout domaine d’activité (institutionnel, énergie, industrie, agroalimentaire, immobilier, financier, etc.).