Actualiser l’apprentissage : former pour transformer

Date de parution

14/01/2022

L’univers de la formation rencontre aujourd’hui de nombreux défis liés aux problématiques posées par l’évolution du monde de l’apprentissage et de la digitalisation. Mais les avancées fulgurantes du monde de la recherche, en neuropédagogie comme en psychologie sociale, permettent aujourd’hui d’inventer des solutions innovantes pour y répondre. Certains acteurs du monde de la formation se consacrent à révolutionner les outils mis à notre disposition pour permettre d’apprendre efficacement tout au long de la vie. C’est le cas de Philippe Korda, associé fondateur de KORDA, qui accompagne les entreprises dans le développement de leurs talents. Également président de l’association reconnue d’utilité publique Énergie Jeunes, il est aujourd’hui l’invité de Callimedia pour nous parler des défis à relever afin d’actualiser l’apprentissage.

La formation en entreprise

Aujourd’hui, les grandes entreprises se tournent de plus en plus vers la formation pour parvenir à un changement. Celle-ci permet d’acquérir des compétences techniques, mais elle permet aussi de se réinventer, d’ « apprendre à apprendre », ainsi que de développer des capacités managériales et des « soft skills ». Ici réside l’objectif de l’entreprise KORDA, qui vise à former de grands groupes de personnes grâce à des acteurs de terrain. Pour cela, KORDA fait appel à des équipes de chercheurs qui travaillent à rendre leurs formations les plus optimales possibles grâce aux neurosciences.

Le concret plutôt que l’abstrait

Dans les entreprises, nous avons recours à la formation pour atteindre des objectifs à court ou moyen terme plutôt qu’à long terme, à l’inverse des formations académiques. Celle-ci doit donc s’axer sur l’expérience et sur l’action concrète plutôt que de laisser les apprenants essayer d’appliquer des notions abstraites à une situation professionnelle future. Philippe Korda préconise donc la formation en situation, en reproduisant des situations réelles dans le cadre de l’apprentissage.

Cette méthode, qui stimule la mise en confiance de l’apprenant par la simulation, s’appuie sur les travaux du psychologue canadien Albert Bandura. Il s’agit de s’appuyer sur tous les outils mis à notre disposition pour « raconter des histoires, faire vivre des expériences » : études de cas, mises en situation et social learning font partie des outils dont l’efficacité a été prouvée.

Former avec de nouveaux formats

Si la digitalisation prenait déjà de plus en plus d’ampleur avant la pandémie du Covid-19, celle-ci en fut un accélérateur ces deux dernières années. Vis-à-vis de la formation, beaucoup d’entreprises se montraient hésitantes à franchir le pas du distanciel, plutôt par manque d’informations que par choix éclairé. Mais la crise sanitaire leur a permis de s’approprier les moyens existants et elles se tournent aujourd’hui de plus en plus vers des formations à distance ou hybrides – en blended learning.

A ce propos, les moyens existants deviennent de plus en plus efficaces, car nous comprenons de mieux en mieux comment les manier. Par exemple, Korda s’intéresse de près au format vidéo, celui-ci étant plébiscité pour former par les études en andragogie. Les modules vidéo permettent de capter l’attention de l’apprenant au sein de formations courtes, reste à s’assurer que le temps dédié soit optimisé. En effet, au sein d’une journée d’apprentissage, seuls de rares moments sont isolés par le cerveau pour créer un « déclic » significatif. Supprimer les temps sans valeur ajoutée se révèle être l’un des défis de la formation aujourd’hui.

Les « mindset » et la formation

En complément de l’andragogie, la psychologie sociale nous permet de perfectionner la formation. Parmi les sujets de recherche majeurs figure celui de Carol Dweck sur les « mindset », les états d’esprit. Avec la simple question : « Êtes-vous d’accord pour dire que l’on est tous naturellement doués pour certaines choses et pas pour d’autres ? », Dweck est parvenue à déterminer que les personnes répondant à l’affirmative ont plus de difficultés d’apprentissage que les autres. Cette affirmation est pourtant fausse et elle constitue un neuromythe. En revanche, nous pouvons retenir qu’en occultant la place capitale qu’occupe le travail et l’entraînement dans l’apprentissage, nous le rendons difficile.

La confiance en soi joue un rôle clé dans la formation. Apprendre à un élève qu’il n’est pas compétent dans un domaine l’empêchera d’y investir du temps et du travail, mais lui apprendre qu’il l’est naturellement aura le même effet. Cet état d’esprit qui fige le monde en deux catégories de personnes, naturellement compétentes ou incompétentes, dévalorise l’effort. Ainsi, plutôt que de dire à un élève qu’il est doué lorsqu’il a obtenu de bons résultats à une évaluation, Dweck et Korda préconisent par exemple de récompenser l’effort.

En somme, il s’agit de prendre conscience de la plasticité du cerveau et de sa capacité à toujours se réinventer avec l’entraînement.

Des modules courts et rigoureux pour former

Chaque module de formation dure 55 minutes et cherche à créer un déclic psychologique avec les collégiens concernés. Énergie Jeunes met au point plus de 150 vidéos et exercices en s’appuyant sur une procédure extrêmement rigoureuse. Aucune déviation n’est permise : les intervenants ne sont pas dans une posture de professeurs, mais dans une posture d’animateurs. Les vidéos guident les sessions, et les formateurs animent les exercices et posent des questions afin de stimuler la classe et permettre une expérience active.

Une efficacité prouvée

Si la question de l’évaluation reste un frein dans les recherches en formation aujourd’hui, Énergie Jeunes est parvenue à relever ce défi, en réalisant une évaluation scientifique approfondie avec l’aide de nombreuses écoles investies dans le projet – l’École Normale Supérieure, Sciences Po, M.I.T… Les chercheurs ont passé 7 ans à suivre les données concernant 23 000 élèves. La moitié bénéficiait des programmes mis en place par Energies Jeunes et l’autre n’en bénéficiait pas, ce qui a permis de relever de manière précise l’efficacité du dispositif.

Les résultats sont clairs : le rapport entre efficacité et coût du projet est 10 fois supérieur à ce qui est observé ailleurs dans le monde. Cette année seulement, 500 établissements scolaires en France métropolitaine et en outre-mer en ont bénéficié, grâce à quoi 120 000 élèves ont pu être formés.

Découvrez notre podcast Never Stop Learning

Cet article est construit à partir de l’échange entre Philippe Korda, président de Korda et président fondateur de l’association Énergie Jeunes, et Gérard Peccoux, président de Callimedia, durant l’épisode 21 de notre podcast Never Stop Learning. Si vous souhaitez en savoir plus sur le Digital learning, découvrez les différents épisodes disponibles sur notre PODCAST. Pour aller plus loin sur le sujet de la formation, découvrez le livre de Philippe Korda, publié en 2011 : « Stratégie et formation ».