Comment développer une formation digitale professionnelle ?

Date de parution

03/05/2021

Marc Poncin, directeur de la formation continue et apprentissage chez Icademie et auteur du livre « Du présentiel au e-Learning efficient », nous partage son expertise acquise au cours de dix années de recherches et développement sur le terrain. Grâce à ses conseils, voyons comment nous pouvons nous y retrouver dans la jungle du distanciel, quelles leçons nous pouvons tirer du passé et vers quelle direction nous devrions tendre dans le futur de la formation digitale.

La jungle du distanciel

Le premier confinement a provoqué une joie incommensurable dans les réseaux de l’EdTech, celui-ci devait annoncer la grande victoire du e-Learning. Cependant, la réalité fut tout autre. L’urgence de la digitalisation des contenus a fait naître un e-Learning « de dépannage », produit avec les moyens du bord et dans un temps trop souvent limité. Des conférences Zoom anti-pédagogiques de plusieurs heures se sont multipliées, essayant tant bien que mal d’être la réplique des formations en présentiel.

La Zoomification de la formation digitale

Reproduire le présentiel à distance donne une mauvaise image du e-Learning. Le résultat offre un format trop descendant et sans aucune interactivité, très loin d’un e-Learning efficient et humanisé. Pour pallier à cela, il faut définir l’objectif de la formation, différent de l’objectif pédagogique. Ensuite, il est primordial d’insister sur le parcours de formation, le Blended Learning étant par exemple une excellente solution.

Il n’est pas nécessaire de vouloir tout passer au e-learning. Chez Callimedia, nous pensons même que c’est contre-productif. Pourtant, notre cœur de métier pourrait laisser croire l’inverse. Prenez l’exemple des aides-soignants, ou des chimistes qui ont besoin d’apprendre une technique d’analyse. Un apprentissage sur le terrain est nécessaire, il ne serait pas optimal pédagogiquement parlant d’essayer de forcer une formation à distance.

La vraie révolution du e-Learning

L’image d’un e-Learning où l’on est lancé seul sur une plateforme avec des ressources persiste. Les faits qui ont suivis le début de la crise n’ont pas arrangé cette impression. Il faut désormais faire attention au contre-courant, car de nombreux apprenants ont eu l’expérience d’un « mauvais e-Learning ». Malgré tout, les consciences se sont éveillées sur l’utilité et la force de la formation digitale. Nous savons désormais que la vraie révolution du e-Learning réside dans la construction pédagogique. Il est de notre devoir d’utiliser notre expérience pour proposer des formations de qualité et redorer l’image du e-Learning.

Les leçons fondamentales du passé de la formation digitale

2012 signe l’émergence des premiers MOOC (Massive Open Online Course), ces formations en ligne accessibles pour un grand nombre de participants. D’abord accueillies comme révolutionnaires, nous constatons que le taux de complétion de ce type de formation est seulement de 10% à 15%. Ces chiffres sont les mêmes depuis la création des MOOC et sont toujours valables aujourd’hui. Il va de soi que créer une formation qui met en place la même disposition de ressources nous amène aux mêmes résultats.

L’importance du tutorat dans la formation digitale

La première leçon fondamentale à retenir vient de l’importance du tutorat. Selon les chiffres 2021 du digital learning proposés par l’ISTF, 65% des formations tutorées offrent un taux de complétion supérieur à 60%. L’accompagnement dans le parcours de formation est fondamental. Les chiffres nous montrent que la présence d’un tutorat dans la formation continue rend celle-ci plus engageante.

Evacuer les idées reçues

Il y a une dizaine d’années, nous pensions que l’enseignant était voué à disparaître dans le processus d’apprentissage. Or, premièrement, nous avons vu que la présence d’un tuteur augmente de taux de complétion. Ensuite, il est nécessaire de vérifier l’intégration des compétences au fil de l’enseignement. Cette étape passe par un échange interactif, entre l’apprenant et un tier. Encore un argument qui n’est pas en faveur du format passif des MOOC.

Du e-Learning 1.0 à la formation différenciée 4.0

Il existe plusieurs versions de la formation :

  • La formation 1.0: Il s’agit d’un cours magistral au format descendant, le professeur parle, les apprenants écoutent.
  • La formation 2.0: Le cours est plus développé, des tableaux ainsi que des schémas s’intègrent au processus d’apprentissage, s’effectuant toujours en présentiel.
  • La formation 3.0: Elle signe le début du e-Learning avec l’apparition des MOOC.C’est un format innovant mais toujours très solitaire et passif. C’est une version à distance de la formation 1.0.
    Maintenant, voyons quelles innovations nous réserve la formation 4.0.

  • La pédagogie différenciée

    Une des leçons de la Taxonomie de Bloom nous démontre que chaque apprenant peut retenir 90% à 95% de ce qu’on lui enseigne à deux conditions : Qu’on lui propose les bons éléments avec la bonne méthode. C’est ce que l’on cherche à accomplir grâce à la pédagogie différenciée : individualiser la formation pour que chacun apprenne à sa vitesse dans des formations en groupe.

    La tendance actuelle nous amène à réhumaniser les apprentissages par plus d’accompagnement et d’interaction. Cette démarche nous permet de tirer parti de l’individuel et du groupe, en combinant le travail solitaire et collaboratif. Le but est d’intégrer les spécificités de chaque apprenant, ce qui rend la formation adaptée selon les particularités individuelles de chacun.

    Un découpage fin de l’enseignement

    Méthodologiquement, cela nécessite de scénariser et de découper la formation en plusieurs objectifs :

  • Un enseignement sous différentes formes : audio, vidéos, textes…
  • Une évaluation formative avec un échange interactif entre l’enseignant et l’élève pour s’assurer de l’acquisition des compétences. Pour cela, il est possible de faire appel à des mini évaluations comme des QCM.
  • Une médiation pour renvoyer l’apprenant à certaines ressources d’apprentissage.

    La formation différenciée 4.0 nous incite à repenser l’objectif de la formation. Nous devons intégrer la question de l’efficience du parcours au centre de la création du contenu au lieu de chercher à maximiser le taux de présence de l’apprenant. Pour atteindre ce but, nous devons tendre vers un e-Learning multimodal, qui combine un parcours en présentiel, en distanciel et en situation de travail.

  • Découvrez notre podcast Never Stop Learning

    Cet article est développé à partir de l’échange entre l’auteur Marc Poncin et Gérard Peccoux, président de Callimedia, durant l’épisode 2 de notre podcast Never Stop Learning. Vous voulez en apprendre plus sur la formation digitale ? N’hésitez pas à vous abonner au podcast pour ne rien rater des prochains épisodes. Vous pouvez également consulter l’ouvrage de Marc Poncin « Du Présentiel au e-Learning Efficient », pour aller plus loin sur ce sujet.